Michèle Tabarot

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Développer la laïcité dans l’entreprise par Michèle Tabarot

Michèle Tabarot est impliquée dans la ville du Cannet depuis 1989, d’abord comme adjointe au maire, puis comme maire, poste qu’elle n’a pas quitté depuis 1995. Député des Alpes-Maritimes depuis 2002, elle a été la première femme à être à la tête d’une commission à l’Assemblée nationale, celle des Affaires culturelles et de l’Éducation. Dans cet article, Michèle Tabarot choisit d’évoquer le fait religieux dans l’entreprise, sous l’angle de la montée de la radicalisation.

L’examen de la réforme du travail au Parlement a été l’occasion de vifs débats sur la prise en compte du fait religieux dans l’entreprise. Pourquoi pensez-vous qu’il s’agit d’un enjeu essentiel?

 
Le débat que nous avons vécu avec la réforme du travail a semblé totalement décalé par rapport à la période grave que nous vivons. Vouloir inscrire, dans un préambule du code du travail, la liberté du salarié de manifester ses convictions religieuses dans l’entreprise aurait été une erreur lourde. 

Il existe dans notre pays une liberté de conscience religieuse, mais certainement pas un droit à « manifester » ses croyances. Une telle disposition aurait conduit à renforcer les revendications communautaires déjà fortes et qui sont totalement contraires aux valeurs de notre pays fondé sur l’unité de la Nation. 

Il a fallu que l’opposition dénonce et combatte fermement cette disposition pour qu’elle soit finalement retirée. Pourtant, de nombreuses réformes sont intervenues pour lutter contre la radicalisation religieuse et le terrorisme. 

Vous pensez qu’elles sont insuffisantes ? 

J’ai soutenu ces textes de loi parce qu’ils sont nécessaires mais je continue à dire qu’ils ne vont pas assez loin face au phénomène de radicalisation. 

Avec plusieurs de mes collègues, nous dénonçons depuis de nombreuses années une dérive contre laquelle il faut être sans concession, comme nous l’avons fait en 2010 avec la loi de Jean-François Copé qui a permis d’interdire le port de la Burqa en France. 

Ces derniers mois, les décisions prises contre ceux qui menacent notre sécurité n’ont pas été assez fortes ou s’avèrent encore insuffisantes. Dans tous les textes qui ont été adoptés, le secteur privé n’a malheureusement pas suffisamment été pris en compte. 

Donc, pour vous, le législateur doit porter une attention plus grande à la sphère privée dans la lutte contre la radicalisation et l’intégrisme ? 

En effet car c’est bien dans cette sphère privée que la radicalisation apparaît, se renforce et trouve à s’exprimer en premier. Tant que nous n’agirons pas plus en amont contre la radicalisation, notamment sur les lieux de travail, nous ne ferons qu’en réparer les conséquences dramatiques. Il n’y a malheureusement pas encore eu cette prise de conscience de la réalité d’une situation pourtant préoccupante.

Justement, quelle est cette situation ? 

Les terribles évènements que nous subissons depuis janvier 2015 montrent l’ampleur de la radicalisation qui est à l’œuvre dans notre pays et que nousavons trop longtemps refusé de regarder en face. En tant qu’élus, nous recevons des témoignages qui démontrent que la montée des revendications religieuses dans le secteur privé est une réalité que nous devons prendre en considération, notamment dans les secteurs stratégiques. L’an dernier, une enquête a montré qu’en France la moitié des managers a déjà été confrontée au fait religieux dans leurs entreprises. Il peut s’agir de jours d’absence pour des fêtes, du port de signes ostentatoires, mais aussi de problèmes liés aux  rapports hommes-femmes. Cela peut aller jusqu’au refus d’exécuter certaines missions, ce qui est manifestement incompatible avec les exigences de bon fonctionnement d’une société. 

Que peuvent faire aujourd’hui les employeurs face aux revendications religieuses ou à la radicalisation d’un salarié ? 

Le principe constitutionnel de laïcité ne concerne aujourd’hui que le secteur public et ne trouve pas à s’appliquer dans le monde de l’entreprise. Or, il n’est plus possible de laisser l’employeur seul et trop démuni face au phénomène religieux.

Le législateur et les pouvoirs publics doivent lui donner les moyens d’agir rapidement pour mettre fin à certains comportements. Actuellement les seules restrictions qu’il peut apporter à l’expression des croyances religieuses de ses salariés sont liées soit à la protection des individus, pour veiller notamment à leur sécurité et éviter tout discours ouvertement prosélyte, soit aux impératifs de bonne marche de l’entreprise, par exemple pour la bonne réalisation de ses missions. 

Mais désormais les préoccupations vont au-delà des questions qui se posaient il y a quelques années encore sur le port de signes ostentatoires ou sur les demandes liées à l’organisation du travail. Face à la radicalisation ouverte de l’un de ses salariés, l’employeur doit pouvoir apporter des réponses immédiates, notamment lorsqu’il s’agit d’un enjeu de sécurité publique. 

Que proposez-vous pour permettre aux entreprises de mieux faire face lorsqu’elles sont confrontées à ces situations ? 

La religion ne doit plus avoir sa place dans l’entreprise qui doit être considérée comme un espace laïc. Chacun est libre d’avoir ses croyances et nul ne doit être discriminé pour ses convictions, mais personne ne doit faire de sa foi un objet de revendication. Il faut élargir au secteur privé les limites posées aujourd’hui pour le service public. 

Aucune doléance confessionnelle et pas de signe ostentatoire sur le lieu de travail, notamment pour les salariés au contact du public. Dans certains secteurs particulièrement sensibles, il faut aussi permettre aux employeurs de mettre immédiatement à pied, à titre conservatoire, un salarié dès lors qu’il présente des signes évidents de radicalisation. 

Je pense notamment au secteur du transport des personnes et des biens mais aussi à tous les domaines qui peuvent toucher à notre sécurité. Ce sont des réformes courageuses que le gouvernement ne semble pas décidé à accomplir. Pour ma part j’estime que nous ne pouvons pourtant plus laisser les employeurs aussi démunis face à la radicalisation religieuse sur le lieu de travail. 
 

La dernière revue est en ligne !

La question écrite de GEEA sur le relèvement des seuils sociaux et fiscaux

Afin de concrétiser la proposition n°11 du livre blanc, GEEA a proposé à ses parlementaires membres de dépose une question écrite auprès du ministre du travail. L'objectif : relever les seuils sociaux et fiscaux de 10 à 20 et de 50 à 100 salariés. 

"Les comparaisons internationales de démographie d'entreprises montrent, qu'en France, l'augmentation des effectifs d'une entreprise et donc le franchissement de certains seuils, accroît très significativement le coût social pour l'employeur tout en y additionnant de nouvelles réglementations. En France, 7 ans après sa création, une entreprise emploie en moyenne 20 salariés, contre 80 en Grande-Bretagne. L'effectif moyen de toutes les entreprises françaises à leur création est de 2,7 personnes contre 6,6 aux États-unis ou encore 4,5 en Allemagne. Véritable frein psychologique à l'embauche, ces seuils sont perçus par l'employeur comme un facteur de complexification administrative et de hausse des cotisations. À titre d'exemple, le franchissement de la barre des 50 salariés a pour conséquence l'application de 34 législations et réglementations supplémentaires pour un coût représentant 4 % de la masse salariale. Il souhaite savoir si le Gouvernement prendra en compte la proposition de Génération entreprise-entrepreneurs associés, composée 120 de parlementaires, demandant le relèvement des seuils sociaux de 10 à 20 et de 50 à 100 salariés. Une telle mesure atténuera la « peur d'embaucher ». Son impact sur l'emploi serait important : 22 500 entreprises embaucheraient des salariés supplémentaires sans ces seuils sociaux. En 2012, l'INSEE et l'IFRAP évaluaient la perte d'emplois générés par les seuils sociaux entre 70 000 et 140 000 emplois."