Olivier Carré

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Lu dans les Echos : La loi El Khomri, symbole de tous les renoncements

Lu dans les Echos : La loi El Khomri, symbole de tous les renoncements

90 parlementaires, membres de GEEA ont publié cette tribune dans les Echos pour dénoncer le projet de loi El Khomri.

Petit déjeuner autour de Paul-François Fournier, Directeur Innovation de BPIFrance

En présence d’Olivier Dassault, Jean-Michel Fourgous, Olivier Carré, Marianne Dubois, Annie Genevard, François Guégot, Arlette Grosskost, Claude Greff, Michel Herbillon, Véronique Louwagie, Gilles Lurton, Alain Moyne-Bressand, François Rochebloine, Catherine Vautrin, Philippe Vitel

Alors que la BPIFrance tient en ce moment l’affiche pour motiver les entrepreneurs et séduire les jeunes : « Entrepreneurs, vous envoyez du bois, nous enverrons du blé », GEEA a souhaité interroger son directeur exécutif et directeur de l’innovation, Paul-François Fournier, sur le rôle de cette banque publique dans le financement des projets innovants.

Paul-François Fournier nous a informé que la BPI France avait fait le choix de « l’effet d’accélération pour les start-up » même si elle continue sa mission de service public là où les banques sont absentes.

Il a rappelé l’importance de l’innovation pour créer de la croissance et des emploiset ajoute que : « l’entreprise innovante croît en moyenne de plus de 10% par an. Celle qui n’est pas innovante a un chiffre d’affaires qui décroît de 2 à 3% par an. Le sujet de l’innovation est au cœur de la problématique de la création de valeurs et derrière c’est l’international. »

Paul-François Fournier a rappelé combien le crédit impôt recherche était essentiel dans le soutien à l’innovation puisqu’une enquête de l’OCDE montre que la France est le troisième pays au monde dans les dispositifs d’incitation à innover.

Petit-déjeuner autour de Philippe d'Ornano, Co-président d'Asmep-ETI

GEEA a reçu le co-président d’Asmep-ETI et Président du directoire de Sisley pour échanger, avec les adhérents et les parlementaires, sur la situation des « ETI : le capitalisme de long terme au service des territoires ».

Le nombre d’ETI Françaises est très faible, 4 600, en comparaison à l’Allemagne (12 500), au Royaume-Uni (10 000), ou encore l’Italie (8 000).  

Pourtant, ces ETI sont des atouts économiques majeurs. « Elles sont à 65% avec des sièges sociaux hors de l’Ile de France ; ce sont des entreprises des régions et qui donnent à nos territoires une stabilité grâce à leur solidité.

Elles représentent : 27% du chiffre d’affaires des entreprises françaises, 1/3 des exportations et 22% de l’emploi salarié. Leur modèle économique est très apprécié par les salariés. Elles allient la proximité grâce à leur taille humaine et en même temps donnent une sécurité aux salariés du fait de leur dimension. Contrairement aux PME, elles n’ont pas de problème de financement. 80% des ETI sont des entreprises familiales. » développe le Président Philippe d’Ornano.

Mais comment développer nos ETI ? « C’est justement l’ambition de l’Asmep » répond-il. « Si on veut créer davantage d’ETI sur le modèle allemand, il faut créer un écosystème raisonnablement compétitif par rapport à la moyenne européenne. En France, nous n’avons pas intégré que les entreprises travaillent dans un environnement et une concurrence mondiale. On ne peut pas vivre replié sur nous-même sans analyser les conséquences des mesures qu’on prend. Il est important de comparer nos systèmes. »

Et quand il parle de la fiscalité des entreprises, la comparaison avec les autres états européens fait mouche : « On taxe 40% de plus les entreprises Françaises, non pas qu’en Chine, mais que la moyenne européenne ! Comment peut-on durablement construire des entreprises et développer les ETI dans ces conditions ? Il y a un enjeu énorme sur la taxation des outils de production.

La France a le taux d’impôt sur les sociétés le plus élevé d’Europe qui peut monter jusqu’à 38%. Comme les marges sont historiquement faibles et que c’est un impôt sur les bénéfices, le produit de cet impôt est dans la moyenne européenne. On parle d’élargir encore l’assiette, c’est-à-dire taxer encore plus les entreprises ! Il est probable que ça aura encore un impact sur les marges et sur les investissements sans pour autant augmenter le rendement.

Le deuxième niveau d’impôt, où il existe un énorme écart par rapport à la moyenne européenne, ce sontles taxes hors IS, locales et sectorielles. Officiellement, il y en a 192 mais certainement beaucoup plus. Les « think tank » travaillent pour les lister de manière plus précise. Quand on les additionne, elles représentent 2/3 de l’impôt sur les sociétés. »

Il conclura ce petit-déjeuner en rappelant que « ce climat anxiogène chez les chefs d’entreprises, qui essaient de créer, est néfaste au site France. Si on veut rediriger l’argent des Français vers l’investissement de long terme, il faut créer un statut et il faut déconnecter la fiscalité du patrimoine de l’investissement avec un engagement de conservation. Si on le fait, on aura fait un grand pas vers la création d’un « Mittelstand » en France. »

Lire le compte-rendu

Assez de pactes, pas assez d’actes par Olivier Carré

Député du Loiret

Membre de la commission des finances

Co-Président du groupe d’études sur les entreprises

Vice-président de GEEA

Des pactes aux actes, le chemin semble bien laborieux. Pacte de stabilité, pacte de compétitivité, pacte de responsabilité, puis pacte de responsabilité et de solidarité : quatre pactes entre novembre 2012 et mars 2014. Et aucun n’a été respecté par son auteur.

Depuis que le pacte de stabilité a été voté –rappelons que ne pas le mettre en œuvre a fait partie des arguments du candidat de gauche à la présidentielle-, les déficits publics se réduisent mais de la moitié de ce sur quoi la France s’était engagée. Le plus grave, c’est que le Gouvernement ne veut pas entendre qu’aujourd’hui, le niveau de la fiscalité est tel, qu’il impacte la croissance organique de notre pays. Ainsi, ce n’est pas la réduction des dépenses publiques –elles sont stables voire en très légère hausse- mais la hausse sans précédent de la fiscalité qui plombe la croissance, donc nos recettes fiscales et donc une moindre diminution de nos déficits.

Le pacte de compétitivité suivait le rapport Gallois. En fait, il permettait à François Hollande de renier, sous pression de nos partenaires européens, ce sur quoi il avait été élu. Le CICE est né à ce moment-là, en décembre 2012. Il faudra attendre mai 2014 pour que les entreprises en bénéficient, souvent à leur plus grande surprise. Les 20 Milliards d’euros d’impôts supplémentaires de 2012 et de 2013 seront restitués sous forme de crédit d’impôt. Dont acte. Complexe, ce dispositif va aider à l’investissement mais pas forcément à l’emploi. En tout état de cause, dans une conjoncture très atone, le chèque du trésor est le bienvenu, notamment pour les PME et les ETI.

Début 2014 : exit le pacte de compétitivité et vive le pacte de responsabilité. Quelle responsabilité ? Personne ne le saura jamais. Si c’est celle de l’Etat, certes, il fera le chèque CICE comme prévu. Mais entre-temps, de nouvelles contraintes se sont abattues sur les entreprises : pénibilité, loi Florange, entrave au temps partiel et j’en passe. Dans ce contexte, le chef de l’Etat a transformé l’annonce par le président du MEDEF de la création d’un million d’emplois si les charges patronales étaient à nouveau abaissées, en obligation de résultats alors que ce n’était qu’un objectif. En quoi les entreprises peuvent-elles s’engager envers l’Etat ? En rien. Elles peuvent s’engager envers leurs clients, leurs salariés ou leurs actionnaires. A l’inverse, parce qu’il influence l’environnement dans lequel elles interviennent, l’Etat est responsable vis-à-vis des entreprises d’une partie de leurs conditions d’exploitation. Faire le chèque du CICE ne l’exonère pas d’être attentif à créer un climat de confiance qui ne peut pas être miné à chaque coin d’article de loi sur le travail, sur la consommation, sur le patriotisme économique. A peine énoncé, le Pacte de Responsabilité était déjà compromis par le niveau d’ambiguïté qu’il nourrissait.

Quelques semaines après les vœux, le pacte de responsabilité s’est vu rattaché les mots « et de solidarité ». On avait « donné » aux patrons ; il fallait « donner » aussi aux salariés. La logique de la contrepartie est toujours à la manœuvre. Aussitôt que les entreprises demandent et obtiennent le report du compte pénibilité, les salariés obtiennent un avantage –non financé- qui abaisse d’un an l’âge à partir duquel les points pénibilités compteront double. Cette échelle de perroquet est mortelle pour les finances publiques. Cela fait 30 ans que les gouvernements achètent la paix sociale en faisant des chèques à crédit. Et celui d’aujourd’hui continue de plus belle, quelques soient les engagements qu’il a pris. Si François Hollande a raison de fustiger la surenchère syndicale –de quelque bord qu’elle vienne-, il fait tout pour l’entretenir.

Depuis le début de son quinquennat, alors que l’environnement européen n’a rien à voir avec les turbulences qu’avait connues son prédécesseur, il ne cesse de louvoyer faisant passer ses paroles pour des actes, cédant souvent au dernier qui a parlé. Encore une fois, les entreprises ont besoin d’une ligne claire, d’une administration qui leur facilite la vie en leur fichant la paix. On cite de plus en plus la phase de Reagan : « Il n’y a rien de plus terrifiant qu’un fonctionnaire qui ouvre la porte d’une entreprise et qui dit :  Je suis là pour vous aider ». La hausse de la fiscalité et de la bureaucratisation de l’économie française est unique dans l’OCDE en cette sortie de crise. Le résultat est sous nos yeux. Alors que les secteurs qui repartent dans le monde sont ceux pour lesquelles de nombreuses entreprises françaises sont championnes, celles qui restent dans notre hexagone sont en panne. Pire, nos principaux compétiteurs, l’Espagne, le Portugal, la Grande-Bretagne, ont bénéficié de relocalisations industrielles et sont redevenues créateurs nets d’emploi. Les investissements qui s’y sont déployés pendant la crise jouent aujourd’hui à plein tandis notre appareil productif français vieilli. Il est à craindre que nous continuions à vivoter en marge d’une croissance mondiale qui ne s’intéresse plus à nous.

Seule petite lueur dans ce sombre tableau, l’initiative du secrétaire d’Etat en charge de la simplification, Thierry Mandon, qui a mis les entrepreneurs au cœur du dispositif de la réforme de l’Etat. C’est courageux et sans doute utile. Si, comme il le souhaite, le monde de l’entreprise peut s’emparer d’un projet de loi et donner sa propre lecture de l’impact qu’elle aura sur l’investissement et sur l’emploi, nous aurons fait un pas dans le bon sens ; trop rare pour ne pas être salué.

Petit-déjeuner autour de Jean-François Roubaud, Président de la CGPME

Après 22 ans d’expérience au sein des organisations patronales et avant de laisser la place à François Asselin à la tête de la CGPME, Jean-François Roubaud nous a livré son analyse sur « les conditions du retour à la croissance ».

« Nos entreprises font face à de vraies difficultés. La principale, c’est bien la faiblesse des carnets de commande. Les chefs d’entreprises sont inquiets aussi parce qu’il y a beaucoup de mesures mais pas de cohérence. »

Et il rajoute : « On nous a dit que les charges allaient baisser au 1er janvier pour les salaires au niveau du SMIC. Mais qu’est ce qui va augmenter ? On vient de créer une super « usine à gaz » avec le compte pénibilité. Contraindre le chef d'entreprise à tenir des fiches pénibilité pour chacun de ses salariés, c'est tout simplement nier la réalité du monde du travail. Aux antipodes du discours ambiant, la fiche pénibilité représente un sommet inégalé dans la complexité imposée aux entreprises. »

Il reviendra également sur les seuils sociaux qu’il désigne comme des freins à l’emploi.

Pendant ce petit-déjeuner, Jean-François Roubaud demandera que des mesures immédiates pour créer des emplois instantanément soient mises en place. « Si vous dites que dans les petites entreprises, vous créez des emplois sans charge, je vous assure que vous allez en créer des milliers ! Il faut plus de souplesse. Entre 2012 et 2014 : 120 pages supplémentaires ont été rajoutées au code du travail et elles sont contradictoires les unes aux autres. » termine le président Roubaud.

A la question d’Alain Chrétien, député de la Haute Saône : « Vos adhérents vous ont-ils déjà donné un retour sur l’obligation de publicité en cas de cession d’entreprise ? »

Jean-François Roubaud répond : « Informer le personnel deux mois avant signifie que les bons éléments s’en vont, les clients s’en vont et donc l’entreprise est fichue ! J’avais proposé au moment de l’examen de la loi Hamon que les salariés qui souhaitent reprendre l’entreprise, aient un délai de deux ans pour réaliser leur projet.  On ne s’improvise pas chef d’entreprise ! ».

Compte-rendu du petit-déjeuner

Tribune dans Le Figaro : Pour vaincre le chômage des jeunes, misons sur l'entreprise !

"Assez de pactes, pas assez d’actes" par Olivier Carré

Des pactes aux actes, le chemin semble bien laborieux. Pacte de stabilité, pacte de compétitivité, pacte de responsabilité, puis pacte de responsabilité et de solidarité : quatre pactes entre novembre 2012 et mars 2014. Et aucun n’a été respecté par son auteur.

Depuis que le pacte de stabilité a été voté –rappelons que ne pas le mettre en œuvre a fait partie des arguments du candidat de gauche à la présidentielle-, les déficits publics se réduisent mais de la moitié de ce sur quoi la France s’était engagée. Le plus grave, c’est que le Gouvernement ne veut pas entendre qu’aujourd’hui, le niveau de la fiscalité est tel, qu’il impacte la croissance organique de notre pays. Ainsi, ce n’est pas la réduction des dépenses publiques –elles sont stables voire en très légère hausse- mais la hausse sans précédent de la fiscalité qui plombe la croissance, donc nos recettes fiscales et donc une moindre diminution de nos déficits.

Le pacte de compétitivité suivait le rapport Gallois. En fait, il permettait à François Hollande de renier, sous pression de nos partenaires européens, ce sur quoi il avait été élu. Le CICE est né à ce moment-là, en décembre 2012. Il faudra attendre mai 2014 pour que les entreprises en bénéficient, souvent à leur plus grande surprise. Les 20 Milliards d’euros d’impôts supplémentaires de 2012 et de 2013 seront restitués sous forme de crédit d’impôt. Dont acte. Complexe, ce dispositif va aider à l’investissement mais pas forcément à l’emploi. En tout état de cause, dans une conjoncture très atone, le chèque du trésor est le bienvenu, notamment pour les PME et les ETI.

Début 2014 : exit le pacte de compétitivité et vive le pacte de responsabilité. Quelle responsabilité ? Personne ne le saura jamais. Si c’est celle de l’Etat, certes, il fera le chèque CICE comme prévu. Mais entre-temps, de nouvelles contraintes se sont abattues sur les entreprises : pénibilité, loi Florange, entrave au temps partiel et j’en passe. Dans ce contexte, le chef de l’Etat a transformé l’annonce par le président du MEDEF de la création d’un million d’emplois si les charges patronales étaient à nouveau abaissées, en obligation de résultats alors que ce n’était qu’un objectif. En quoi les entreprises peuvent-elles s’engager envers l’Etat ? En rien. Elles peuvent s’engager envers leurs clients, leurs salariés ou leurs actionnaires. A l’inverse, parce qu’il influence l’environnement dans lequel elles interviennent, l’Etat est responsable vis-à-vis des entreprises d’une partie de leurs conditions d’exploitation. Faire le chèque du CICE ne l’exonère pas d’être attentif à créer un climat de confiance qui ne peut pas être miné à chaque coin d’article de loi sur le travail, sur la consommation, sur le patriotisme économique. A peine énoncé, le Pacte de Responsabilité était déjà compromis par le niveau d’ambiguïté qu’il nourrissait.

Quelques semaines après les vœux, le pacte de responsabilité s’est vu rattaché les mots « et de solidarité ». On avait « donné » aux patrons ; il fallait « donner » aussi aux salariés. La logique de la contrepartie est toujours à la manœuvre. Aussitôt que les entreprises demandent et obtiennent le report du compte pénibilité, les salariés obtiennent un avantage –non financé- qui abaisse d’un an l’âge à partir duquel les points pénibilités compteront double. Cette échelle de perroquet est mortelle pour les finances publiques. Cela fait 30 ans que les gouvernements achètent la paix sociale en faisant des chèques à crédit. Et celui d’aujourd’hui continue de plus belle, quelques soient les engagements qu’il a pris. Si François Hollande a raison de fustiger la surenchère syndicale –de quelque bord qu’elle vienne-, il fait tout pour l’entretenir.

Depuis le début de son quinquennat, alors que l’environnement européen n’a rien à voir avec les turbulences qu’avait connues son prédécesseur, il ne cesse de louvoyer faisant passer ses paroles pour des actes, cédant souvent au dernier qui a parlé. Encore une fois, les entreprises ont besoin d’une ligne claire, d’une administration qui leur facilite la vie en leur fichant la paix. On cite de plus en plus la phase de Reagan : « Il n’y a rien de plus terrifiant qu’un fonctionnaire qui ouvre la porte d’une entreprise et qui dit :  Je suis là pour vous aider ». La hausse de la fiscalité et de la bureaucratisation de l’économie française est unique dans l’OCDE en cette sortie de crise. Le résultat est sous nos yeux. Alors que les secteurs qui repartent dans le monde sont ceux pour lesquelles de nombreuses entreprises françaises sont championnes, celles qui restent dans notre hexagone sont en panne. Pire, nos principaux compétiteurs, l’Espagne, le Portugal, la Grande-Bretagne, ont bénéficié de relocalisations industrielles et sont redevenues créateurs nets d’emploi. Les investissements qui s’y sont déployés pendant la crise jouent aujourd’hui à plein tandis notre appareil productif français vieilli. Il est à craindre que nous continuions à vivoter en marge d’une croissance mondiale qui ne s’intéresse plus à nous.

Seule petite lueur dans ce sombre tableau, l’initiative du secrétaire d’Etat en charge de la simplification, Thierry Mandon, qui a mis les entrepreneurs au cœur du dispositif de la réforme de l’Etat. C’est courageux et sans doute utile. Si, comme il le souhaite, le monde de l’entreprise peut s’emparer d’un projet de loi et donner sa propre lecture de l’impact qu’elle aura sur l’investissement et sur l’emploi, nous aurons fait un pas dans le bon sens ; trop rare pour ne pas être salué. 

Avoir confiance dans les entreprises par Olivier Carré

En l’espace de deux ans, j’ai participé à l’élaboration de trois rapports sur la compétitivité de notre économie. Tout est sur la table. Les diagnostics sont tous concordants et partagés. Et pourtant, on ne cesse d’empiler les dispositifs contraignants en accroissant l’emprise du monde politique sur le fonctionnement interne des entreprises. Le CICE, la BPI, sont autant d’illustrations de ce mauvais ressort qui n’est pas nouveau : moraliser la vie économique quand on ne sait plus quel sens donner à la Nation.

Il manque à toutes ces prises de décision un a priori simple mais cardinal : « Avoir confiance dans les entreprises ». Voilà le leitmotiv de la véritable révolution dont la France a besoin aujourd’hui. Confiance dans la capacité qu’ont les entreprises à s’adapter à un environnement de plus en plus complexe et qui regorge d’opportunités ; confiance dans la nécessité pour une entreprise de chercher les meilleurs collaborateurs quitte à assurer leur formation ; confiance dans leur compréhension du monde de demain parce que c’est en construisant ce qui n’existe pas encore qu’elles développent leur croissance.

Nous sommes loin des ressorts des grandes politiques dites de la demande, où la dépense budgétaire de l’Etat était le carburant de la croissance. 30 ans de déficits publics se sont accumulés dans une dette dont le poids se fera lourdement sentir dès que les taux d’intérêts retrouveront un niveau normal. Ces politiques publiques, toujours en œuvre en France, ont montré leur limite dans le contexte de croissance mondiale que nous connaissons. Leur coût a été sous-estimé. Il se traduit notamment par la destruction régulière de nos capacités productives. Ainsi, en vingt ans, la croissance « standard » de la France est passée de près de 4% à 0,5%. Elle est aujourd’hui inférieure à notre croissance démographique ce qui signifie qu’elle n’assure plus l’amélioration de la vie de nos classes moyennes. On est au bout d’un système, qui a fait ses preuves mais qui est obsolète.

En tant qu’ancien chef d’entreprise, je ne peux ni me satisfaire du résultat ni me complaire dans la critique. Seuls compte le plan, la vision et l’actionqu’il faut mettre en place pour redonner une place à la croissance. On peut discerner trois leviers d’action : une réforme de fonds de notre système social, la restauration des marges des entreprises françaises et une meilleure appréhension des avantages que l’on peut tirer dela zone euro.

Le premier sujet est d’ampleur : près de 600 Milliards d’Euros et l’essentiel des dérives des comptes publics de ces dernières années. Si nous avions la certitude d’avoir un système qui marche et qui soit partagé par tous, cela vaudrait le coup. Mais ce n’est pas le cas. Prenons les retraites. Le mode de calcul inquiète les jeunes générations qui se disent qu’elles payent pour un droit dont elles ne bénéficieront pas. Il en est de même pour la santé, dont l’universalité est mise à mal par un nombre grandissant d’exceptions. Et ne parlons pas de la formation professionnelle ou du logement. Notre système n’est plus soutenable. Est-il trop généreux ? Non. Est-il mal organisé ? Oui. Il faut recentrer sur chacun ce qui a été conçu pour tous. On ne répond plus à l’heure d’internet de la même façon qu’on le faisait lorsque l’information était rare et d’accès difficile. Aujourd’hui, chacun veut pouvoir maîtriser son destin. Cela donne aux grands acteurs que sont les partenaires sociaux et l’Etat, une obligation de moyens qui ne se résume pas aux seuls équilibres comptables. Cela passe par la définition de nouveaux périmètres entre ce qui relève de la volonté collective –paritarisme- et de la couverture de droits universels dont la « portabilité » est garantie-Etat-.

A ce stade, tout ce qui relève de la solidarité nationale doit être financé par l’Etat. Cela amènera à relever la fiscalité des personnes tout en soulageant les prélèvements réalisés au sein de l’entreprise. La France taxe moins la consommation et plus la production qu’ailleurs en Europe. Il faut inverser cette situation. La piste de la TVA anti-délocalisation est la bonne. Dans le même sens, l’entreprise n’a plus à être le collecteur zélé des contributions. Nos administrations et les grands collecteurs, aidés par la @-administration, doivent pouvoir répartir entre les caisses intéressées les charges collectées forfaitairement auprès des entreprises. Une régularisation annuelle serait suffisante. Toujours pour avancer vers plus d’efficacité, il faut approfondir l’idée de l’abandon de la TVA inter-entreprises. Cela soulagerait les bas de bilan tout en restant neutre pour l’Etat.

Enfin, nous devons changer notre façon de travailler au niveau européen. Trop souvent, la France se veut plus contraignante sur le plan des normes que ce qu’a voulu imposer Bruxelles. Nous sommes trop souvent absent des commissions préparatoires où s’élaborent normes et autres règlements qui vont régenter la production et le commerce intra-européen. L’Europe reste pour nous une affaire « étrangère » alors que l’Euro est notre monnaie. C’est un non-sens. Dans de nombreux domaines, le vrai travail se fait à Bruxelles, plus à Paris. Ainsi, toute directive devrait être transposée « à maxima » dans notre droit : la loi française ne pourra pas être plus contraignante que la règle européenne. Cette doctrine permettrait à nos entreprises d’œuvrer dans un champ concurrentiel loyal et uniformisé. Nous nous habituerions ainsi à mieux travailler à l’échelle communautaire qui représente notre principale zone d’influence économique. Enfin, nous devons harmoniser les assiettes fiscales qui servent à calculer l’impôt sur les sociétés afin d’éviter l’optimisation qui diverge trop de ressources de notre pays alors même que la création de valeur se fait sur notre sol.

Plus de responsabilité, plus d’air et plus d’Europe me semblent être les ingrédients d’une véritable révolution entrepreneuriale pour notre pays. C’est l’un des deux piliers de la restauration de notre avenir, le second étant de revoir l’ensemble de nos dépenses publiques et de les ramener à ce qu’elles pesaient en 2000. Tout se tient. Les opportunités sont là. Par exemple, la croissance investit le continent africain. Nous y avons des affinités non seulement liées à notre passé mais aussi au présent d’une jeunesse française qui y entretient une partie de ses racines. Là encore, c’est un atout que nous devons saisir pour la décennie qui vient. Enfin, tous les secteurs qui ont émergé à l’occasion du Programme des Investissements d’Avenir sont parmi les plus prometteurs du siècle. La France dispose de champions en herbe qui ne demandent qu’à bénéficier d’un climat qui ailleurs a promu des Huawei, Google ou autre Genzyme. Nous sommes à un tournant. A nous de tordre le cou aux idées reçues, de penser aux jeunes générations qui rêvent de réussir en Europe et d’avoir l’esprit d’entreprise dans notre volonté de redresser la France.

 

Les parlementaires de GEEA reçus par Nicolas Sarkozy

Olivier Dassault, accompagné de quelques parlementaires, membres son association "Génération Entreprise Entrepreneurs Associés" (GEEA), a été reçu par Nicolas Sarkozy. L'avenir des entreprises françaises et les mesures de sortie de crise furent au menu des discussions avec l'ancien chef de l'Etat. Cette rencontre devrait permettre d'alimenter la réflexion de GEEA engagée dans la rédaction d'un livre blanc sur les entreprises d'ici la fin de l'année.