Pour un service universel de santé au travail par Pascale Gruny

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Mieux organiser le système de santé au travail pour améliorer, in fine, les conditions de travail : telle est la principale conclusion du rapport que je viens de rendre avec mon collègue sénateur Stéphane Artano sur la santé au travail.

L’enjeu pour la société et l’économie est de taille. Le coût des accidents du travail, des accidents de trajet et des maladies professionnelles était de 12 milliards d’euros en 2018, soit plus de 58 millions de journées perdues... Des arrêts de travail qui augmentent, quelles que soient les tranches d’âge.

Les 51 auditions menées (à Paris et dans les Hauts-de- France) et les déplacements effectués à l’étranger nous ont permis de formuler plusieurs propositions pour améliorer le système en place.

Le réseau des services de santé au travail (SST) pâtit d’abord de l’absence d’un pilo- tage national fort capable de garantir des prestations de qualité sur tout le territoire et pour l’ensemble des entreprises, quelle que soit l’importance de leur effectif.

Face à cette situation, il est urgent de créer une agence nationale de la santé au travail, au statut de groupement d’intérêt public, qui serait le fruit de la fusion de l’Anact et des organismes œuvrant dans le domaine de la prévention des risques professionnels, à savoir l’INRS et Eurogip.

La simplification de la gouvernance de la santé au travail au niveau national doit éga- lement s’accompagner d’une rationalisation – et non d’une suppression – du réseau des acteurs de terrain de la prévention, pour plus de lisibilité auprès des employeurs.

Le réseau territorial de la santé au travail doit s’articuler autour de deux piliers : d’un côté, les services de santé au travail inte- rentreprises (SSTI) et autonomes (SSTA) en proximité ; de l’autre, les organismes locaux de sécurité sociale de la branche AT-MP qui réuniraient en région les agents de santé au travail des Carsat et les agents des Aract.

En outre, le système français de santé au travail est profondément inégalitaire car certaines catégories de travailleurs restent exclues de la médecine du travail. C’est le cas de la plupart des travailleurs non-sala- riés, notamment les artisans, commerçants et chefs d’entreprise, ainsi que les profes- sions libérales, soit environ 2,8 millions de personnes.

Nous proposons donc d’intégrer les chefs d’entreprise dans l’effectif suivi par le ser- vice de santé au travail d’une entreprise, sans majoration de la cotisation versée, ainsi que le rattachement obligatoire des travailleurs non-salariés au service de santé au travail de leur choix. Nous souhaitons aussi que les salariés de sous-traitants soient suivis dans les STTA.

Face au manque de médecins du travail, il est indispensable de renforcer l’attractivité du métier. Les écarts de densité de méde- cins du travail sont en effet significatifs sur le territoire et cette spécialité est la quatrième spécialité médicale la plus âgée en France.Le réseau des services de santé au travail (SST) pâtit d’abord de l’absence d’un pilotage national fort capable de garantir des prestations de qualité sur tout le territoire et pour l’ensemble des entreprises, quelle que soit l’importance de leur effectif.

Face à cette situation, il est urgent de créer une agence nationale de la santé au travail, au statut de groupement d’intérêt public, qui serait le fruit de la fusion de l’Anact et des organismes œuvrant dans le domaine de la prévention des risques professionnels, à savoir l’INRS et Eurogip.

La simplification de la gouvernance de la santé au travail au niveau national doit également s’accompagner d’une rationalisation – et non d’une suppression – du réseau des acteurs de terrain de la prévention, pour plus de lisibilité auprès des employeurs.

Le réseau territorial de la santé au travail doit s’articuler autour de deux piliers : d’un côté, les services de santé au travail interentreprises (SSTI) et autonomes (SSTA) en proximité ; de l’autre, les organismes locaux de sécurité sociale de la branche AT-MP qui réuniraient en région les agents de santé au travail des Carsat et les agents des Aract.

En outre, le système français de santé au travail est profondément inégalitaire car certaines catégories de travailleurs restent exclues de la médecine du travail. C’est le cas de la plupart des travailleurs non-sala- riés, notamment les artisans, commerçants et chefs d’entreprise, ainsi que les professions libérales, soit environ 2,8 millions de personnes.

Nous proposons donc d’intégrer les chefs d’entreprise dans l’effectif suivi par le ser- vice de santé au travail d’une entreprise, sans majoration de la cotisation versée, ainsi que le rattachement obligatoire des travailleurs non-salariés au service de santé au travail de leur choix. Nous souhaitons aussi que les salariés de sous-traitants soient suivis dans les STTA.

Face au manque de médecins du travail, il est indispensable de renforcer l’attractivité du métier. Les écarts de densité de médecins du travail sont en effet significatifs sur le territoire et cette spécialité est la quatrième spécialité médicale la plus âgée en France.

Ainsi, nous proposons d’autoriser les étudiants du deuxième cycle de médecine à effectuer une partie de leur stage obligatoire de médecine générale en alternance avec un service de santé au travail, et d’autoriser les médecins du travail à exercer une spécialité complémentaire étroitement liée à la prévention (allergologie, addictologie, nutrition, médecine du sport, etc.).

Dans un contexte de judiciarisation crois- sante des conflits liés à la santé et la sécu- rité au travail, il est indispensable de mieux accompagner les employeurs dans la mise en œuvre de leur obligation de sécurité. Selon la dernière enquête sur les condi- tions de travail de 2013, seulement 46 % des employeurs ont élaboré ou mis à jour un document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP) au cours des douze mois précédant l’enquête, bien qu’il s’agisse d’une obligation depuis 2001. Il est ainsi proposé que le DUERP fasse l’objet d’une rédaction commune entre l’employeur, les représentants du personnel et le SST.

Enfin, nous abordons dans le rapport un sujet très contemporain et insuffisamment pris en compte à ce jour : les risques psychosociaux (RPS) et l’amélioration de la qualité de vie au travail.

Le monde du travail présente aujourd’hui un paradoxe. Si la préservation de l’état de santé des travailleurs impliqués dans des formes pénibles de travail, en particulier dans le secteur industriel, a tendance globalement à s’améliorer, l’intensification du travail et les pressions qui lui sont associées se manifestent en revanche par une délégation croissante de responsabilités sans pour autant que les salariés concernés se voient accorder les moyens et marges de manœuvre correspondants.

Pour faire du travail un facteur d’épanouissement individuel et collectif, nous sommes allés nous inspirer des pratiques du Danemark. Ce déplacement nous a permis de prendre la mesure du retard accumulé par notre pays dans l’adaptation des modes d’organisation du travail aux besoins des travailleurs.

La prévention de l’épuisement professionnel et le développement d’une culture d’entre- prise misant sur un management bienveillant et à l’écoute se sont imposés au Danemark où le bien-être au travail est devenu un enjeu réputationnel pour les entreprises. Les entreprises danoises attachent ainsi une grande importance à la mise en œuvre de modes d’organisation du travail adaptés aux besoins et contraintes des salariés.

Ainsi, nous préconisons dans l’immédiat une meilleure sensibilisation, par la voie de la formation, des encadrants, de l’ensemble des salariés mais aussi des personnels de l’inspection du travail à la prévention des risques psychosociaux et à l’importance de l’organisation du travail sur l’état de santé des salariés.

Une meilleure prévention des RPS (risques psychosociaux) au travail nécessite également la présence obligatoire dans tous les services de santé au travail d’un psychologue du travail au sein de l’équipe pluridisciplinaire ou le conventionnement avec une structure en disposant.

Enfin, dans un souci d’amélioration du bien- être des travailleurs, nous proposons de confier aux services de santé au travail le soin de conduire, tous les trois ans, une évaluation de la qualité de vie au travail dans chaque entreprise adhérente qui donnerait lieu à un diagnostic entre le SST et l’entreprise et l’élaboration d’un plan d’action en faveur de la qualité de vie au travail.

Le capital humain, c’est capital ! Une bonne gestion des ressources humaines rime avec une meilleure productivité et des gains économiques importants pour l’entreprise. Ce constat est d’ailleurs partagé par l'OCDE qui estimait en 2012 que d'ici à « 2060, le capital humain serait l'un des moteurs principaux pour assurer la croissance à long terme de l'activité économique ». Indéniablement, la santé au travail peut y contribuer.