Le handicap en entreprise : pour une économie plus inclusive par Emmanuelle Anthoine

Depuis 2005, la loi impose aux entreprises de plus de 20 salariés un quota de 6 % de travailleurs handicapés, lesquels représentent 6,6 % de la population active. Pourtant, le taux de chômage des personnes en situation de handicap reste élevé, il s’établit à 19 % soit le double de celui des valides.

Avocate au Barreau de Lyon depuis 1989, puis de Valence à compter de 1994, Emmanuelle Anthoine est particulièrement sensible aux problématiques du handicap et de l’égalité entre les femmes et les hommes. Le handicap en entreprise présente alors des enjeux économiques et sociaux importants auxquels nous nous devons de répondre.

Le handicap en entreprise, quel avantage ?

Les personnes en situation de handicap sont une réelle richesse pour l’entre- prise. Au contraire d’être une difficulté, le handicap représente un réel atout. Les travailleurs handicapés font preuve d’une détermination et d’une motivation exem- plaires. Les retours d’expérience nous indiquent que les salariés handicapés sont considérés par leur employeur comme plus consciencieux et plus fidèles à l'entreprise. Un volontarisme et une forte capacité d'adaptation leur sont reconnus.

Qu’est-ce que la loi prévoit pour les travailleurs handicapés ?

Les articles L.5212-1 et L.5212-2 du code du travail prévoient une obligation d’emploi de 6 % de personnes handicapées pour toute entreprise du secteur privé occupant au moins vingt salariés. Ces dernières peuvent toutefois éviter l’obligation d’emploi à condition de verser une contribution calculée en fonction du nombre de travailleurs handicapés qu’elles auraient dû employer. C’est l’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des handicapés (Agefiph) qui collecte cette contribution en vue de financer des actions en faveur des personnes handicapées.

Quelles évolutions ont été apportées par le projet de loi avenir professionnel ?

Le projet de loi avenir professionnel a étendu le champ d’application du taux de 6 % qui était auparavant limité aux établissements de plus de 20 personnes. Davantage d’entreprises seront ainsi concernées. Il a également introduit une clause de revoyure tous les 5 ans pour faire évoluer ce taux. Il prévoit ensuite que la déclaration sur l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés soit simplifiée en étant réalisée dans le cadre de la déclaration sociale nominative (DSN). Enfin, seuls seront désormais comptabilisés les salariés de l’entreprise au contraire des recours à des entreprises adaptées, à des établissements et services d’aides par le travail (Ésat) ou à des travailleurs handicapés indépendants. Néanmoins, sous couvert de normaliser l’activité des travailleurs handicapés, le Gouvernement a acté un recul de leurs droits. Les droits à congés payés des personnes handicapées sont ainsi passés de sept semaines à cinq semaines, sans qu’il n’y ait de compensation.

Les structures de formation des personnes handicapées sont-elles efficaces ?

Il apparait essentiel de réformer l’organisation de la formation des travailleurs handicapés. Les centres de rééducation profession- nelle (CRP) ne permettent pas, actuellement, un taux de retour à l’emploi suffisant. Il existe une multitude de structures : centres de formation d’apprentis (CFA) spécialisés, CFA handicap, etc... qui gagneraient à être harmonisées. Si une majoration du CPF est prévue en leur faveur, l’enjeu de la formation des salariés handicapés n’a pas assez été pris en compte par le projet de loi avenir professionnel. C’est pour cette raison que j’ai déposé plusieurs amendements sur le sujet qui n’ont malheureusement pas été adoptés.

L’indemnisation des accidents du travail – maladie professionnelle est-elle suffisante ?

On pense souvent que les victimes d’accident du travail ou de maladie professionnelle sont bien indemnisées. Mais dans les faits, ces personnes se retrouvent plongées dans la précarité en étant éloignées du marché du travail. Ne pouvant plus exercer leur métier, une indemnisation de quelques milliers d’euros ne suffit pas à compenser l’absence de leurs revenus. D’où ma volonté, à l’occasion du projet de loi avenir professionnel, de renforcer la protection des salariés face à la procédure de licenciement pour inaptitude qui conduit bien souvent à une désinsertion professionnelle. Mais là encore, mes amendements sont restés lettre morte et beau- coup reste à faire. Nous devons imaginer des solutions pour permettre le retour à l’emploi de ces actifs alors que l’excédent de la branche AT-MP autorise certaines marges de manœuvre financières.