Eolien, quel bilan pour les entreprises ? par Emmanuel Maquet

Emplois, retombées économiques, rôle des entreprises... Quel bilan peut-on tirer de l’implantation des parcs éoliens sur nos territoires ?

Rencontre avec Emmanuel Maquet, Député de la Somme et membre de la commission d’enquête sur l’impact des énergies renouvelables pour évoquer le sujet.

Monsieur le Député, vous remettez régulièrement en cause les prix pratiqués par l’éolien en France. Pourtant, le Ministre de la transition écologique et solidaire n’a-t-il pas assuré en octobre dernier que le kilowatt heure sortant d’une éolienne terrestre en France est bel et bien au prix du marché ?

Peut-on encore parler de « prix du marché » lorsque l’on voit les sommes considérables d’argent public qu’il a fallu pour y arriver ? Depuis le début des années 2000, l’État a garanti aux exploitants d’éoliennes des tarifs de rachat préférentiels de l’électricité produite. D’après les chiffres de la CRE, le surcoût lié à cette énergie a déjà représenté plus de 10 milliards d’euros cumulés depuis 2002. 45 milliards sont déjà enga- gés pour les vingt prochaines années. La PPE prévoit en outre le triplement du parc éolien terrestre en 2023 et l’ouverture de 12 parcs éoliens en mer avant 2028. La question n’est donc pas d’atteindre le prix du marché. Devenir compétitif, c’est la moindre des choses lorsqu’on est soutenu par le contribuable !

Mais l’implantation d’éoliennes sur nos territoires a forcément des retombées positives pour le tissu économique de notre pays ?

Malheureusement, tout indique que l’éolien ne suit pas le brillant exemple de l’aéronautique en la matière. Dans son rapport de mai 2018, la cour des comptes jugeait d’ailleurs le bilan industriel « décevant ». L’industrie française est loin d’avoir pleinement bénéficié de l’essor économique observé sur le marché des énergies renouvelables ces dernières années.

Et en termes de création d’emplois ?

Ce n’est là encore guère plus réjouissant... D’après France Énergie Éolienne, il y aurait 17 100 emplois liés à l’énergie éolienne, dont seulement 3 799 dans la manufacture des appareils en tant que tels, le reste des emplois étant liés à l’expertise, l’ingénierie ou la maintenance. Une retombée bien faible si on la met en rapport avec l’argent public englouti en 2019 : cela représente 88 000 euros par emploi créé, bien plus qu’un contrat aidé ! Pourtant, en diminuant ces contrats aidés en 2018, le gouvernement avait fait un constat implacable : la subvention en pure perte d’emplois peu productifs, ça ne marche pas ! Il fait paradoxalement tout l’inverse avec cette politique de soutien aux éoliennes.

Face à ce constat, quel rôle va pouvoir jouer la commission d’enquête sur l’impact des énergies renouvelables dont vous êtes membre ?

La commission va apporter davantage de transparence. Nous sommes dans une situation où les profits sont privatisés pour des groupes industriels étrangers, sans créer suffisamment de valeur sur notre territoire, tandis que le risque est mutualisé grâce au contribuable français. Et tout cela se fait en occasionnant des externalités négatives de moins en moins tolérées : bétonisation des sols, mutation des paysages, vibrations sonores, recyclage complexe... Si encore ces turbines permettaient de produire de l’électricité, on pourrait s’en accommoder. Malheureusement, soumise aux aléas météorologiques, leur production fluctue entre 0 et 70 % de leur potentiel. Au final, la puissance éolienne installée représente 10 % du potentiel électrique français, mais seulement 4,5 % de la production effective. Et qui paye une grande partie de la facture ? Les entreprises. Combien d’entre elles auraient profité de cet argent s’il avait été laissé au contribuable, libre d’être dépensé ou investi ? Combien d’entrepreneurs ont moins gagné pour que les fabricants d’éoliennes danois ou norvégiens gagnent davantage ? Telles seront les interrogations de la commission dans les toutes prochaines semaines.