Points d’étapes au Sénat : actions de groupe, bien-être au travail, agriculture et travail dissimulé par Pascale Gruny

Pascale Gruny, Sénateur de l’Aisne, membre de la commission des affaires sociales et de la commission des affaires européennes du Sénat est aussi vice-président du Conseil départemental de l’Aisne et Directeur administratif et financier dans un groupe automobile regroupant des concessions automobiles.

Elle a à cœur de défendre l’entreprise dans le cadre de son activité parlementaire mais aussi sur le terrain. Les derniers mois ont été riches d’action pour (ou peut-être contre ?) les entreprises et ont permis une diversité de prises de position.

 

Quel regard portez-vous sur le principe d'une action collective élargie dans le Projet de Loi "Justice du XXIème siècle" ?

Clairement, le projet de loi "justice du XXIème" n'a d'ambitieux que le nom. Dans sa rédaction initiale, le texte posait les bases d’un socle commun pour l’action de groupe. Il proposait des dispositions spécifiques pour l’action de groupe en matière de discrimination au travail. Ces dispositions étaient bien évidemment inacceptables tant elles auraient fragilisé les entreprises.

C’est pourquoi, j’ai déposé des amendements afin d’éviter de nouvelles contraintes. Il s'agissait de supprimer le socle commun de l’action de groupe, la qualité pour agir ou le champ du préjudice… Ces amendements, très soutenus par les sénateurs du groupe les Républicains, ont reçu un très bon accueil au Sénat et ont pesé sur les travaux des députés. Les entreprises françaises ont besoin, peut-être plus que jamais, qu'on leur facilite la tâche. Je resterai donc trés vigilante à la suite réservée aux mesures que j’ai proposées et défendues.

Comment contrer le travail dissimulé ?

Le travail dissimulé n'est pas sans conséquence sur notre modèle économique. Chaque année, ce sont quelques 20 à 24 milliards d'euros qui ne tombent pas dans les caisses de l'Etat. Un tel manque à gagner est inadmissible. De ce fait, depuis plusieurs années, une véritable chasse à la fraude a été engagée.

Le travail dissimulé recouvre deux réalités bien distinctes : d’une part, les fraudes qui conduisent à une concurrence déloyale, et, d’autre part, des erreurs faites par des employeurs de bonne foi, pénalisés par la complexité et les lourdeurs administratives. Voilà pourquoi il faut instaurer un véritable dialogue entre les entreprises et l'administration. Cela doit être une priorité.

L’enjeu est de taille pour notre modèle économique, tant le travail dissimulé reste une vraie préoccupation. Il ne s’agit pas de stigmatiser le comportement de certains entrepreneurs. J’insiste sur ce point. Cela n’aurait aucun sens. Bien au contraire, l'administration ne doit plus uniquement sanctionner et punir, elle doit mieux accompagner les entreprises. Sur ce sujet, je suis convaincue qu'il vaut mieux une administration qui accompagne qu'une administration qui punit !

L’exploitation agricole, une entreprise comme une autre ?

Bien que particulière, la gestion d'une exploitation agricole n'en demeure pas moins semblable à celle d'une entreprise. Dans son fonctionnement, elle tend même à se complexifier car l'exploitant agricole travaille sur du vivant. Il ne faut pas l'oublier. Cette particularité lui impose une responsabilité face aux exigences des consommateurs.

Le métier d'agriculteur a beaucoup évolué. La maîtrise des techniques agricoles a changé,  tout comme les opérations comptables et de gestion ont évolué ou les techniques de vente. Dans les faits, la profession a connu une profonde mutation, le tout dans un environnement qui, quant à lui, est resté très administratif.

Et que dire de l'inflation des normes franco-françaises qui s'ajoutent aux normes européennes?! Elles doivent rester au niveau européen ! La France ne doit pas ajouter des normes plus contraignantes que ce qui est décidé au niveau européen. Je l'ai d'ailleurs rappelé au Ministre de l'Agriculture le 15 mars dernier lors de la séance des Questions au Gouvernement. L’agriculture française dépend de l’Union européenne et toute contrainte supplémentaire se traduit directement sur les marchés, et par une concurrence accrue des autres pays européens.

Dans le contexte de crise agricole que nous connaissons, avec des enjeux nationaux, européens, mondiaux, la ferme française doit s’adapter pour pouvoir toujours compter.

L'enjeu, aujourd'hui, est donc de permettre aux agriculteurs de vivre décemment de leur métier. Il ne faut pas leur compliquer la tâche en leur imposant des règles du jeu que personne ne pourrait tenir, pas même nos voisins européens. Sur un marché européen extrêmement concurrentiel et parfois faussé par le dumping fiscal de certains Etats membres, les agriculteurs français ont besoin du soutien des pouvoirs publics. Donnons aux agriculteurs français les clés pour appréhender au mieux les évolutions de leur métier !

Comment faciliter les démarches administratives des particuliers employeurs ?

Je suis récemment intervenue au Sénat en séance publique sur le Chèque Emploi Service Universel, un dispositif pratique facilitant les démarches administratives des employeurs particuliers, créé il y a 10 ans par le "plan Borloo" et la loi du 26 juillet 2005.

Le CESU a de l'avenir ! Les facteurs vérifiant ce constat sont nombreux ; le vieillissement de la population française en est un parmi d'autres. Nous vivons mieux, plus longtemps et avons donc besoin de services.

Ce dispositif a été repris pour les très petites et petites entreprises avec le Titre Emploi Service Entreprise (TESE). C’est peut être la réponse à la simplification tant demandée par les entreprises!

Travail et bien-être font-ils toujours bon ménage ?

Un récent sondage montre que 75 % des salariés prennent plaisir à aller au travail. Ce chiffre est non seulement rassurant mais il en dit également beaucoup sur la relation qu'ont les Français avec le travail. Je fais partie de ceux qui pensent que le travail est d'abord un facteur d'épanouissement avant d'être une source de contraintes, d’épuisement et de mal-être.

Laisser croire le contraire, comme je l'entends trop souvent, c’est oublier que la loi impose aux employeurs de s’assurer de la bonne santé morale et physique de leurs employés. Je rappelle d'ailleurs que juridiquement, l'entreprise est pleinement responsable des conditions de travail. Il faut le souligner. Contrairement à certaines idées reçues, il n’est pas possible de faire tout et n’importe quoi au sein de l’entreprise !

C'est cette position que j'ai récemment défendue au Sénat. Le bien-être au travail est une priorité essentielle pour les entreprises. Un salarié heureux au travail est un salarié productif. Les entreprises n'ont pas besoin qu'on leur rappelle : elles le savent mieux que quiconque !